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jeudi 2 juin 2011

PRIX D’EUROPE 2011
Une cure de rajeunissement pour le centenaire

Véritable joyau du patrimoine culturel au Québec, le prestigieux concours du Prix d’Europe célèbre cette année son centenaire. Wilfrid Pelletier, Jacques Hétu, Colette Boky et Chantal Juillet sont quelques-unes des personnalités renommées du domaine musical au Québec, qui ont remporté ce prix permettant de parfaire une formation musicale en Europe. Cette vénérable institution a fait peau neuve pour présenter un concours mieux adapté au 21e siècle et permettre aux lauréats d’avoir une plus grande ouverture sur le monde.                                                                                                                                             
UNE RESTRUCTURATION DE FOND EN COMBLE
Fondée en 1870 par décret de la Reine Victoria, l’Académie de musique du Québec se voulait une première tentative de normaliser la formation musicale dans la province de Québec. C’est donc à elle que le gouvernement confie en 1911 l’administration du Prix d’Europe. Le nombre de participants étant en progression, il devenait important que les règles établies par l’Académie soient revues et mieux adaptées à la situation actuelle. Il y a deux ans, la pianiste Lise Boucher, elle-même récipiendaire du Prix d’Europe en 1958, présidente de l’Académie et responsable du concours, a décidé de s’attaquer à la restructuration de l’institution. Pour la seconder dans cette tâche difficile, elle a fait appel à l’impresario Michel Buruiana, un passionné des arts et de la culture qui possède une vaste expérience des affaires et du domaine culturel, maintenant président du comité d’honneur et conseiller spécial au sein du conseil d’administration de l’Académie.                              

UNE ÉTAPE DE PLUS DANS LE DÉROULEMENT DU CONCOURS   
Il n’est pas facile pour un jury de comparer instrumentistes et chanteurs. La sélection préliminaire se fait à partir de l’audition d’un disque compact d’une durée de 25 à 30 minutes par un jury formé de trois membres. Par la suite, un récital de 50 à 55 minutes devant jury devient demi-finale du concours. À l’épreuve finale, ajoutée cette année pour la première fois, quatre finalistes doivent présenter un récital de 30 à 40 minutes, Durant ces deux épreuves devant public, 34 candidats seront entendus dans les disciplines suivantes : piano, violon, violoncelle, guitare, saxophone, clarinette, trombone, trompette, hautbois, percussion et chant.       
                                               
DES PRIX PLUS NOMBREUX  
Cette année, les lauréats se partageront près de 65 000 $, soit presque deux fois le montant de l’an dernier. Chaque finaliste recevra un prix de 5 000 $. Le récipiendaire du Prix d’Europe remportera 30 000 $ et le lauréat du Prix John Newmark 9 000 $. D’autres prix s’ajoutent : le Prix Hedwidge Buruiana (1 000 $), le Prix Monik Grenier (1 000 $) et le Prix de composition Fernand-Lindsay 2011. Cette bourse de 10 000 $ est offerte par la Fondation Père Lindsay aux deux ans. En plus, deux prix de journalisme musical seront créés, dont le Prix Frédéric-Pelletier, nommée en l’honneur de l’un des pionniers du journalisme musical. Ce prix sera accordé au journaliste qui aura retenu l’attention du jury par un article exceptionnel. L’an prochain, pour répondre à la grande demande dans les conservatoires et les universités, un prix sera attribué dans la nouvelle discipline de jazz classique.                                                                                                            
DE GRANDS PROJETS POUR REDORER LE BLASON DU PRIX
Pour que l’Académie de musique du Québec et le Prix d’Europe retrouvent le lustre et la renommée qu’ils méritent, il fallait de grands projets. Les idées foisonnent dans la tête des organisateurs qui souhaitent marquer avec éclat le centenaire de l’institution. Ils ont d’abord invité de grandes personnalités pour former un Comité d’honneur, des chefs de file dans des milieux variés, qui croient à l’importance du Prix. On y retrouve, entre autres, des grands noms du domaine des arts et d’autres provenant de professions libérales. On y compte aussi deux Grands Ambassadeurs : le chef d’orchestre Yannick Nézet-Séguin et Pierre-Henri Deleau, une sommité dans le monde du cinéma.                                                                
            Une exposition de 70 photos de lauréats se tiendra à la Chapelle historique du Bon-Pasteur durant le concours. De plus, le clarinettiste et ondiste Jean Laurendeau publiera un livre documentaire au cours de l’année. Mais là ne s’arrête pas le rêve des organisateurs qui espèrent voir l’éclosion d’un Musée de la musique, un temple de la renommée qui suivra l’évolution de la musique au Québec. « Un voyage éducatif fabuleux pour la jeunesse! » déclare Michel Buruiana.                                                                                                                         
UN ATOUT IMPORTANT DANS LA VIE DES LAURÉATS
Récipiendaire du Prix d’Europe 1986, le pianiste Jean Saulnier a fait partie du jury de l’édition 2005. « Encore aujourd’hui, dit-il, le Prix d’Europe est porté par cet héritage prestigieux qui témoigne à travers le temps de l’importance de la musique chez nous tout en permettant aux jeunes de s’inscrire dans une continuité inspirante. Le Prix d’Europe m’a été très utile comme à tous les lauréats qui sont en début de carrière en me permettant d’avoir accès aux conseils des meilleurs professeurs. Les gestes que j’ai pu poser alors, grâce à ce soutien, déterminent aujourd’hui mes activités de professeur et d’interprète. » Violon-solo à l’OSM depuis 2008 et détenteur du prix en 1997, Olivier Thouin affirme : « C’est surtout le point de départ qui a servi a me faire connaître, pour que mon nom circule davantage. » Pour sa part, la soprano Marie-Danielle Parent remarque : « Ce prix m’a apporté la reconnaissance de mes pairs en tant que musicienne et artiste : j'ai remporté ce prix en 1980 contre tous les autres instrumentistes. Je crois bien être la seule chanteuse qui a remporté ce prix. » Effectivement, depuis cette date, aucun Prix d’Europe n’a été accordé en chant.
      La présidence d’honneur de la 100e édition a été confiée au claveciniste et organiste Kenneth Gilbert, lauréat du Prix d'Europe pour orgue en 1953. Les autres membres du jury sont : Jean-Marie Poupelinprofesseur de hautbois au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, Yuriko Naganuma, violon solo de l'Octuor de France, Christophe Guiot, violoniste au Théâtre National de l’Opéra de Paris, Nicole Lorange, soprano, tête d’affiche au Metropolitan Opera pendant plusieurs saisons, Rachel Martel, pianiste répétitrice à la Faculté de musique de l’Université Laval et Gabriel Thibaudeau, compositeur et pianiste. Les compositeurs Denis Gougeon, John Rea et Ana Sokolovic seront les membres du jury dans la catégorie composition.  

      Les organisateurs ne ménagent pas leurs efforts afin d’assurer la pérennité d’un concours indispensable à l’élargissement des horizons pour les jeunes musiciens. Le Gala du centenaire aura lieu à la Salle Claude-Champagne le 12 juin. On promet une agréable soirée de musique avec, en deuxième partie, Marin Naturisca, Michel Donato et un groupe de jazz. Que la fête commence pour que continue de briller ce joyau de notre culture!

Du 5 au 10 juin à la Chapelle historique du Bon-Pasteur, http://www.prixdeurope.ca/index.htm




            

lundi 21 février 2011

ÉLISE PARÉ-TOUSIGNANT
reçoit le Prix Opus Hommage 2011 

Pédagogue enthousiaste et gestionnaire dynamique, Élise Paré-Tousignant a contribué de façon importante à l’essor de la musique au sein de la société québécoise, en tant que professeure, administratrice, directrice artistique et citoyenne engagée au sein de plusieurs organismes musicaux. La vie l’a souvent placée au bon endroit au moment des grandes décisions, alors que tout restait à faire. Travailleuse infatigable, elle réussit à communiquer sa passion pour la musique à tous ceux qui la côtoient. Le Conseil québécois de la musique a choisi de rendre hommage cette année à cette pionnière du milieu musical en lui décernant le prix Opus Hommage 2011.              

L’enseignement de la musique : une question de choix
Élise Paré-Tousignant est née à Deschambault, une petite municipalité sur les rives du fleuve entre Québec et Montréal. Très tôt initiée à la musique par sa mère, organiste à l'église du village pendant plus de soixante ans, c’est du côté de la famille de son père que lui est venue la passion d’enseigner. Dès l’enfance, elle chantait déjà dans les chorales, assistait le professeur de musique et étudiait le piano. La carrière d’interprète, difficilement envisageable à cette époque, n’a jamais été une option pour la jeune pianiste qui a étudié à Québec, au Conservatoire et à l’Université Laval.
      Pionnière de l’enseignement de la musique au secondaire, elle participe à la formation des enseignants dans le cadre du nouveau baccalauréat en éducation musicale. Pendant sa carrière à l’Université Laval, elle enseigne la formation auditive tout en assumant diverses fonctions administratives, notamment celles de doyenne de la Faculté des arts et de vice-rectrice aux ressources humaines. Multipliant ses interventions dans les organismes musicaux, elle participe à plusieurs conseils d’administration. Lors de la création des cégeps en 1968, elle est de ceux qui participent à la création de l’option musique du cégep Ste-Foy, à la suite d’une entente avec l’Université Laval.

Les grands défis : le Domaine Forget et le Palais Montcalm
En 1993, elle accepte de joindre le Domaine Forget, à la demande de son directeur, Françoys Bernier, affecté par la maladie. À son décès, à peine deux semaines plus tard, Élise Paré-Tousignant assumera la direction artistique de l’institution. La première rencontre avec le conseil d’administration a lieu le lendemain des funérailles et le dépôt du rapport pour construire une salle de concert est à l’ordre du jour. Un défi majeur! Il faut poursuivre l’œuvre de Françoys Bernier se poursuive. La construction de cette nouvelle salle a été un facteur décisif pour la vie musicale dans la région. De cette aventure, Paré-Tousignant ne garde que de beaux souvenirs. « C’est un site magique sur le bord du fleuve, dit-elle. Il faut y vivre pour réaliser à quel point c’est un lieu extraordinaire pour faire de la musique. »
      En1997, au moment où se dessine la nouvelle vocation du Palais Montcalm, elle devient membre du conseil d’administration de la Société du Palais Montcalm. Un autre défi de taille est relevé, avec le résultat qu’on connaît : Charlevoix et Québec possèdent les deux meilleures salles de concerts du Québec.
      Le premier concert dans la nouvelle salle du Domaine Forget, avec le flûtiste Alain Marion et les Violons du Roy, sous la direction de Bernard Labadie, demeure un moment mémorable. Un événement émouvant qu’elle a eu la chance de revivre au Palais Montcalm, cette fois encore avec les Violons du Roy et la Chapelle de Québec. « C’est toujours un sentiment extraordinaire, quand la musique résonne pour la première fois dans une salle! »                                                                                                                 
Implication communautaire
De 2001 à 2005, elle est du Conseil québécois de la musique (CQM). « C’est une organisation extrêmement importante, un point d’ancrage pour les musiciens, quelle que soit leur forme d’expression musicale. » En 2003, à la demande de la ministre de la Culture et des Communications du Québec, un comité qu’elle préside fait la tournée d’évaluation des écoles de musique, des écoles de danse, des camps musicaux et des orchestres de jeunes au Québec. Une tournée qui a été fle préalable à la levée du moratoire sur le financement de ces institutions.
      Citoyenne engagée dans sa communauté depuis toujours, Élise Paré-Tousignant a communiqué sa passion de la musique à toute la population. Elle a le souci de la mise en valeur du patrimoine musical religieux, pour lequel elle a suscité un véritable engouement. Elle fait partie des membres fondateurs de l’École de musique Denys Arcand et du comité de direction artistique pour l’intégration des arts dans des lieux patrimoniaux.                     

L’importance de la musique dans notre quotidien
La carrière de Mme Paré-Tousignant a été jalonnée de distinctions. En 2006, elle est devenue Officier de l’Ordre national du Québec. Sa principale réalisation? « Il est difficile de choisir, dit-elle, chaque projet étant important, même s’il n’est pas spectaculaire. »                                                                  


lundi 17 janvier 2011

CINQ ORGANISTES AU SERVICE DE WIDOR
Entrevue avec Jacques Boucher

La Scena Musicale, octobre 2010

Dans les petits villages du Québec au XXe siècle, la musique d’orgue et le chant grégorien ont bercé l’enfance de la pluparT. Les municipalités étant dépourvues de structures culturelles, la vie musicale était concentrée dans les églises. « En fait », dit Jacques Boucher, titulaire de l’orgue Casavant de l’église Saint-Jean-Baptiste de Montréal depuis 1986, « l’espace symphonique du village, c’était l’église avec son orgue et son chant grégorien. C’était le lieu de culture, le lieu municipal où tu pouvais entendre de la musique ». Natif de Saint-Pascal de Kamouraska, il avait hâte au dimanche pour aller entendre le chant grégorien à l’église où son père a chanté la messe pendant 50 ans.

      En 1995, à l’occasion du 150e anniversaire de naissance de Charles-Marie Widor et du 115e anniversaire de fondation de Casavant Frères, facteur d’orgues de Saint-Hyacinthe, l’intégrale des dix symphonies pour orgue de Widor fut donnée par cinq organistes différents dans cinq villes du Québec. Cette activité a eu lieu grâce à Jacques Boucher qui a fondé en 1984, avec l’organiste Antoine Reboulot, l’association « Les grandes heures de l’orgue symphonique français ». Le CD "découverte" de ce mois-ci nous propose un mouvement de chaque symphonie interprété par ces organistes.

Un génie musical méconnu
Charles-Henri Widor est décédé en 1937 à l’âge de 93 ans. Nommé organiste à l’église Saint-Sulpice de Paris à l’âge de 26 ans, il y demeura durant 64 ans. Il fut aussi professeur au Conservatoire de Paris et compte parmi ses élèves de nombreux compositeurs de renom et la plupart des organistes influents de France. Compositeur prolifique, il est connu également comme chef d’orchestre, auteur et critique musical. Toutefois, malgré l’importance de sa production et les différents postes qu’il a occupés dans le milieu musical, son œuvre demeure peu connue, à l’exception de la célèbre Toccata, mouvement final de sa Cinquième Symphonie. Pourtant, l’ensemble grandiose de ses dix symphonies constitue, avec les œuvres de J.S. Bach, un des monuments du répertoire pour orgue. Il est le dernier survivant d’une époque révolue. « Dans la vision de Widor, note l’organiste Benjamin Waterhouse, la technique de l’orgue ne peut qu’être fondée sur l’étude des grands maîtres dont, bien sûr, Johann Sebastian Bach, et les habiletés de l’improvisateur ne doivent jamais faire oublier celles de l’interprète ».

La musique d’orgue à l’époque de Widor  
Il existait à l’époque de Widor ce qu’on appelait les « messes d’orgue ». La musique commençait avant l’entrée du célébrant et ne s’interrompait que le temps du sermon. Le public, les intellectuels et les artistes pouvaient aller entendre le « concert » du maître dans le salon de la tribune d’orgue. Avec ses nominations à Saint-Sulpice et au Conservatoire, Widor était devenu un des musiciens les plus en vue de la capitale. Il fit construire un salon privé derrière l’orgue où il recevait le gratin de la grande société. et même Albert Schweitzer, dit-on.

Le coffret de l’intégrale des dix symphonies
Les quatre premières symphonies pour orgue paraissent sous le numéro d’opus 13 en 1872. Les quatre symphonies suivantes de l’opus 42 sont publiées entre 1879 et 1887. Ce n’est que huit ans plus tard qu’apparaît la Symphonie « gothique », suivie de la Symphonie « romane » en 1900 qui marque un changement de direction. Ce sont les deux seules symphonies de Widor qui utilisent un motif grégorien. Le motif de la Neuvième Symphonie, dédiée à l’orgue de la Basilique Saint-Sernin à Toulouse (église gothique), est inspiré de la Messe de la Nativité, tandis que celui de la Dixième Symphonie, dédiée à l’orgue de l’église abbatiale Saint-Ouen de Rouen (église romane) provient de l’Haec dies, un chant grégorien festif de la Messe de Pâques.

      Cinq organistes interprètent les œuvres dans cinq villes de la province, ce qui constitue une sorte d’itinéraire, de Montréal aux portes de la Gaspésie : Jean-Guy Proulx à la cathédrale Saint-Germain de Rimouski, Gilles Rioux à la basilique Notre-Dame-du-Cap de Cap-de-la-Madeleine, Benjamin Waterhouse à la cathédrale de Saint-Hyacinthe, Jacquelin Rochette à l’église Saint-Roch de Québec et Jacques Boucher à l’église Saint-Jean-Baptiste de Montréal. La facture d’orgue a connu un renouveau dans les années 1960, avec un retour à un type d’instrument qui peut jouer de la musique plus ancienne. Tous les instruments sont de la maison Casavant qui possède une expérience riche de plus de 125 ans. Ils servent admirablement la musique de Widor.

L’avenir des orgues du Québec
Le cri d’alarme est lancé depuis un bon moment. L’un après l’autre, les orgues sont réduits au silence. Les angoisses suscitées par les discussions autour de l’église du Très-Saint-Nom-de-Jésus laissent présager un avenir incertain pour ces bijoux du patrimoine. D’après Jacques Boucher, le cas le plus triste est celui de l’église de Lacolle qui a été convertie en restaurant. « Elle possédait le plus vieil orgue jouable de Casavant. On ne peut pas demander aux seuls paroissiens pratiquants de soutenir une église. Il faut qu’on la considère comme un héritage patrimonial et non pas comme patrimoine religieux. Le Ministère doit avoir des règles de conservation. Peut-on moralement dilapider un tel héritage ? »