PHILIPPE
SLY
Une
nouvelle comète au firmament de la scène lyrique
La Scena Musicale - juillet-août 2012
La Scena Musicale - juillet-août 2012
Voix superbe, allure
de jeune premier et charisme étonnant : le baryton-basse Philippe Sly a
rapidement séduit une bonne partie du public du Concours Musical International
de Montréal (CMIM). Celui-ci était néanmoins loin de se douter que le jeune chanteur
allait rafler presque tous les prix.
La dernière année
avait déjà été des plus fastes pour l’artiste de 23 ans : lauréat 2011 des célèbres Auditions du Conseil
national du Met de New York, Révélation classique de Radio-Canada 2011-2012, prix
Jeune Soliste des Radios francophones publiques. Philippe
Sly avait choisi pour le CMIM des œuvres de styles différents, chantées avec sobriété,
espérant que sa personnalité transparaîtrait à travers son interprétation,
n’hésitant pas à terminer sa prestation sur une page méditative de la Passion selon Saint-Mathieu de Bach.
Voix et expression
corporelle – un intérêt qui n’a jamais faibli
Ayant grandi à
Ottawa, d’une mère originaire de La Tuque au Québec et d’un père de Gananoque
en Ontario, le chanteur a toujours été intéressé par la combinaison de la voix
et de l’expression corporelle. Dès la tendre enfance, il était déjà un showman. Vêtu d’un habit noir, d’un
chapeau et de gants, il chantait et dansait en imitant son idole Michael
Jackson, À l’âge de sept ans, il a pu étudier le théâtre, aussi bien que la
musique, tout en s’initiant à l’opéra. C’est à McGill qu’il s’immergea
complètement dans ce monde fabuleux. L’apprentissage du cinéma a aussi nourri
son intérêt pour la scène. Chaque vendredi, les enfants de la famille Sly devaient
écouter un film choisi par le père et le commenter. Il se rappelle aujourd’hui
combien la voix de baryton d’Orson Welles et celle de Laurence Olivier dans
Shakespeare ont meublé son imaginaire : « de la musique pour ses oreilles ».
L’évolution du
chanteur et de l’acteur : une progression réfléchie
Philippe vient de compléter un baccalauréat en
interprétation vocale. « Mon professeur en technique vocale à McGill, Sanford
Sylvan, est unique. Son approche est différente avec chaque étudiant. Sans
imposer sa technique, il aide le chanteur à découvrir sa personnalité et le son
naturel de sa voix » À son arrivée, il
y a quatre ans, son registre vocal alternait entre contre-ténor et basse.
L’année suivante, on lui attribuait le rôle de Nick Shadow, le baryton dans The Rake’s Progress de Stravinski,
répertoire excitant, mais particulièrement exigeant. Le critique Claude Gingras
notait, au sujet du nouveau venu : « Un interprète se détache
nettement de l'ensemble et vaut finalement tout le spectacle: Philippe Sly, en
Nick Shadow portant tricorne et verres fumés et bougeant avec la rapidité d'un
serpent. La voix de baryton et l'aisance en scène sont déjà celles d'un grand
professionnel. Étonnant. » Il campa ensuite le rôle de Marcello dans La bohème, un grand défi pour lui.
Dès
qu’il entre en scène, impossible de ne pas remarquer l’importance chez lui de l’expression
corporelle qu’il a beaucoup observée au théâtre et au cinéma. « Toutes les
expressions sont perceptibles au cinéma, ce qui n’est pas le cas au théâtre et
à l’opéra, explique-t-il. Il faut beaucoup de concentration pour arriver à
exprimer ce que l’on veut dans un simple haussement de sourcils. Il n’y a
pas de trucs. Quoique l’on t’enseigne, il faut toujours passer du temps à faire
une recherche personnelle.»
Malgré
l’expérience acquise cette année avec l’ensemble lyrique du Canadian Opera Company à Toronto, Philippe préfère se montrer prudent côté répertoire. Il
choisira donc d’abord Mozart, Haendel, Britten et Donizetti, plutôt que Verdi.
Il rêve toutefois d’incarner un jour le personnage fuyant de Don Giovanni, en
espérant en saisir le caractère, ainsi que celui eu Billy Budd.
D’ici
là Philippe sera de la distribution de Das
Labyrinth au Festival de Salzburg
cet été et fera ses débuts à l’Opéra de San Francisco en juin 2013 dans Cosi
Fan Tutte de Mozart, dans le rôle de Guglielmo. L’amorce d’une carrière qui
s’annonce florissante !
ENCADRÉ
Philippe
Sly enregistrera son premier album en septembre avec le pianiste Michael
McMahon pour la maison de disques Analekta. On pourra entendre le Dichterliebe, 4 poèmes du compositeur
français Guy Ropartz, d’après le même Intermezzo
lyrique de Heinle ayant inspiré Schumann. Don Quichotte à Dulcinée de Ravel et Three Tennyson Songs, écrites pour lui par son ami le compositeur
anglais Jonathan Dove. Un deuxième CD des Cantates
de Rameau avec la soprano Hélène Guilmette, le claveciniste Luc Beauséjour et
un petit ensemble suivra la version donnée en concert le dimanche 30 septembre
à la salle Bourgie.